La réalité
Une semence jetée en terre. Quoi que l’homme fasse – qu’il dorme ou qu’il veille – cette semence grandit et « la terre produit d’abord l’herbe puis l’épi puis du blé plein l’épi ». Une semence qui arrive toujours à maturité : « lorsque le blé est mûr, l’homme y met la faucille, puisque le temps de la moisson est arrivé. » Sur cette terre – puisque c’est bien d’elle qu’il s’agit – rien ne se fait sans effort. Les adultes le savent bien et l’enseignent à leurs enfants dès le plus jeune âge. Sur cette terre, si l’on veut réussir, il faut se battre, se donner de la peine et, malgré tout le mal qu’on se donne, on n’est jamais sûr d’arriver à porter du fruit. Chez nous les humains, ce qu’on sème n’est jamais assuré d’arriver à maturité. Un violent orage ou un tremblement de terre peut toujours tout compromettre. Combien de vies qui semblaient bien parties ont été brisées par des guerres, des traumatismes dont on ne se remet jamais, des malheurs à répétition qui finissent par écraser celui qui les subit ?
Cette parabole qui est censée nous donner une image du « règne de Dieu » semé en terre ne rejoint en rien l’expérience que nous avons de la vie ici-bas. Elle ne nous touche pas. Elle ne nous concerne pas. Le règne de Dieu, dont nous parle Jésus, est peut-être pour plus tard mais sûrement pas pour nous qui ne sommes jamais assurés de rien en ce bas monde.
Les paraboles
« Par de nombreuses paraboles semblables, Jésus annonçait (à la foule) la Parole, dans la mesure où ils étaient capables de l’entendre. » Une parabole, étymologiquement, signifie « lancer ou jeter à côté ». C’est le contraire de lancer et mettre dans le mille. Une parabole manque toujours la cible. Elle est toujours à côté. Jésus l’emploie pour nous déplacer. « Vous croyez, nous dit-il, que la vie se réduit à l’expérience que vous en avez. Vous croyez que rien n’est sûr en ce monde. Vous croyez qu’à force d’efforts vous arriverez peut-être à surmonter les épreuves. Vous croyez mettre dans le mille en réduisant la vie à ce que vous en connaissez. Eh bien, moi je vous le dis, vous êtes à côté. Il y a – sur cette terre – un autre côté de la vie que vous ignorez et que je viens vous révéler. »
Jésus « ne disait rien aux foules sans parabole, mais il expliquait tout à ses disciples en particulier ». Les disciples sont ceux qui acceptent de le suivre, de se laisser déplacer par ce qu’il dit. Les apôtres qui l’auront suivi jusqu’au bout, jusqu’à sa mort et à sa résurrection, découvriront qu’il est lui-même ce grain jeté en terre que rien ne peut empêcher de grandir et de porter du fruit. Ce jour-là ils découvriront que ni la haine, ni la bêtise, ni l’orgueil, ni l’indifférence, ni l’injustice, ni les tempêtes, ni les tremblements de terre n’ont pu éteindre l’amour que Dieu nous porte et qui se révèle en Jésus-Christ. Le règne de Dieu, qu’évoquait la parabole, est bien parmi eux. Il demeure bien au milieu de nous. Il est ce trésor caché que l’on ne peut trouver qu’en s’appuyant sur la Parole de Jésus et non sur ce que nous croyons savoir de la vie en ce bas monde.
La foi
« A quoi allons-nous comparer le règne de Dieu ? Par quelle parabole allons-nous le représenter ? Il est comme une graine de moutarde : quand on la sème elle est la plus petite de toute les graines… » « Si vous aviez la foi, gros comme une graine de moutarde, vous diriez à l’arbre que voici va de planter dans la mer et il vous obéirait. » Quand Jésus parle en paraboles, il nous demande de le suivre autrement dit de le croire envers et contre tout. Il nous paraît évident qu’il faut se battre pour réussir et ne pas compter ses efforts. Il nous paraît évident que rien n’est sûr en ce monde et que l’on peut toujours échouer, se fracasser sous un coup de la vie plus fort que les autres. Jésus nous demande de croire que nous ne sommes pas seuls pour affronter ces épreuves. Il nous demande de croire en l’Amour que Dieu porte à chacun et qui nous donnera la force de supporter les coups de la vie. Il nous demande de croire que notre terre est enracinée en Dieu, en l’Amour qu’il lui porte.
Le règne de Dieu est parmi nous dès cette terre. Mais on ne peut le découvrir et en vivre que par la foi. Ici-bas, notre foi est soumise à l’épreuve de ce que nous appelons la réalité. Les injustices, les massacres, les guerres sont un fait. Le règne de Dieu, règne de justice, de paix, d’amitié, d’amour, de bienveillance nous semble bien étranger. « Ce que vous appelez la réalité n’est pas le tout de la vie », nous dit Jésus. « Écoutez ce que je vous dis, laissez-vous déplacer par ma Parole et vous découvrirez progressivement la face cachée de ce monde. » Plus nous croyons en l’amour invincible que Dieu nous porte, plus nous le recevons et plus nous devenons capables de le donner. Nous reconnaissons alors progressivement que cette puissance d’aimer grandit en nous, que nous dormions ou que nous veillons. Nous connaissons par notre propre expérience que rien ne peut empêcher l’Amour d’aimer et que, de limite en limite, plus rien ne peut nous empêcher d’aimer l’Amour. Nous reconnaissons que Dieu nous enfante. C’est sa propre vie, sa propre énergie, qui germe, grandit en nous jusqu’à porter tout son fruit.
Pour accéder à ce royaume dès cette terre, pour devenir frères de Jésus et fils du Père des cieux, Dieu n’a pas besoin de nos efforts ni de nos mérites mais de notre foi. Comme il sait que nous en manquons, il la donne gratuitement à ceux qui veulent bien la recevoir ! Que Dieu nous donne d’y croire !
Christine Fontaine, extrait du site http://dieumaintenant.com/