Le temps de la Résurrection, avons-nous vu, est marqué par une paix offerte : celle du Ressuscité, qui conduit à la joie de la reconnaissance, et ouvre à la réception d’un appel à témoigner à partir de ce que nous vivons. Il en a été ainsi avec les disciples d’Emmaüs, Thomas et tous les autres… Aujourd’hui, selon Jean, il nous est donné d’assister à la troisième manifestation de Jésus ressuscité des morts auprès de Pierre et des Apôtres… Que devient donc cette dynamique, lorsque l’apparition du Ressuscité se répète ?…
Pierre retrouve son équilibre en renouant avec son ancienne activité : « Je m’en vais à la pêche. » il y retrouve la consistance de son métier, ainsi que celle de l’action coordonnée avec d’autres « Nous allons avec toi. » … Et soudain une invitation inattendue, « ils jetèrent donc le filet, et cette fois ils n’arrivaient pas à le ramener, tellement il y avait de poisson ». La pêche miraculeuse entraîne alors Pierre à aller rejoindre celui qu’il reconnaît comme son Seigneur.
Et là, il est, ils sont accueillis par une présence. Jésus leur dit : « Venez déjeuner. » le rythme se ralentit : Pierre entre comme les autres, dans une atmosphère plus méditative, plus silencieuse. Pierre demeure dans cette paix offerte où présent, passé et futur peuvent, dans la lumière du petit matin, se mêler, se répondre, tisser, inventer de nouveaux possibles. De là, une parole de création peut se dire, entrainer un nouveau faire en commun… une disponibilité nouvelle surgit, un appel nouveau se formule, il sera entendu… Il suffit d’un cœur disponible : « Simon, fils de Jean, m’aimes-tu ? »… la question revient non tournée seulement vers le passé mais le futur qu’elle cherche à marquer.
Pierre devient, à ce moment, essentiellement coopérateur de Jésus et de sa manière pour aider d’autres à entrer dans cette nouvelle vie. Il ne s’agit plus, pour lui, de faire comme lors de la pêche nocturne, mais de donner la possibilité à d’autres d’entrer dans cette contemplation, ce repos… Il s’agit de paître les brebis du Seigneur, brebis touchées au cœur directement par le Seigneur, de laisser ainsi les choses advenir en étant soi-même seulement présent, patient, attentif, espérant. Nous somme définitivement loin de toute maîtrise, libérer du pouvoir sur les autres… La figure présente du Christ peut s’estomper, d’autres peuvent prendre sa place, non pour faire mais pour donner aux autres, à tous les autres d’entrer dans cette nouvelle présence, dans cette paix qui donne de recevoir cette Vie qui s’offre depuis l’Origine… « Et Dieu vit tout ce qu’il avait fait, et voici : c’est très bien ! Il y eut un soir et il y eut un matin – le sixième jour. » [Genèse 1, 31]. Dieu entra dans son repos. Nous sommes, nous aussi, aujourd’hui, appelés à en devenir les témoins…
Jean-Luc Fabre, compagnon jésuite, extrait du site https://jardinierdedieu.fr/
